« Trump se trompe complètement » : le président de la Colombie livre sa vérité sur les trafiquants de drogue tués en mer

« Trump se trompe complètement » : le président de la Colombie livre sa vérité sur les trafiquants de drogue tués en mer

Les États-Unis ont-ils vraiment visé des embarcations remplies de cocaïne et de fentanyl, deux drogues qui font des ravages sur le territoire américain ? Le président de la Colombie, Gustavo Petro, en doute depuis la publication d’un article dans le New York Times, expliquant que ce sont plutôt des paquets de cannabis qui sont venus s’échouer sur les rivages sud-américains après les attaques.

Le récit du média américain, qui s’appuie sur des témoignages d’habitants, a fait l’effet d’une bombe. Il révèle que les paquets retrouvés en compagnie des corps des personnes tuées par ces frappes contenaient plutôt du cannabis. Tout en rappelant la possibilité que de la cocaïne fasse aussi partie de l’embarcation, ce récit remet en tout cas en cause la théorie de cartels qui trafiqueraient à grande échelle ces drogues qui tuent de nombreux Américains.

Les États-Unis ont mené une trentaine d’attaques depuis le mois de septembre, tuant une centaine d’occupants. Ces frappes, hors de tout cadre légal, ont suscité de vives critiques de la part des observateurs internationaux.

Le président colombien s’est notamment appuyé sur la parution de cet article pour livrer sa vérité sur ces attaques américaines qui sont en train de déstabiliser la partie nord du continent sud-américain. « Il s’avère que de nombreux bateaux attaqués aux missiles, comme c’est le cas lors des saisies que nous effectuons en Colombie, ou avec notre aide à l’étranger, transportaient non pas de la cocaïne, mais du cannabis », a martelé Gustavo Petro sur son compte X.

Le chef d’État de ce pays d’Amérique du Sud a ensuite relevé l’ironie de la situation : « Paradoxalement, aux États-Unis, le cannabis est légal dans de nombreux endroits, a-t-il relevé. Trump se trompe complètement. La cocaïne à destination de l’Europe est acheminée clandestinement par sous-marin et conteneur. C’est le cannabis qui est visé illégalement. »

Des frappes pour ébranler le régime de Maduro

Les États-Unis ont-ils agi bien trop légèrement ? Les attaques d’embarcations supposées contenir des drogues dures étaient déjà très critiquables : l’administration Trump a décidé sans même demander l’approbation du Congrès de tuer des suspects sans aucune présentation de preuve, pour des accusations qui ne seraient même pas passibles de la peine de mort sur le sol américain.

Destinées en réalité à ébranler le régime de Nicolás Maduro, au Venezuela, ces frappes ont peut-être ainsi été, en plus, justifiées par de fausses allégations. Rappelant le comportement d’une autre administration américaine, celle de George W. Bush, arguant de la présence « d’armes de destruction massive » pour justifier une intervention en Irak en 2003. C’est d’ailleurs la même expression qui a été utilisée par Donald Trump il y a deux semaines, classant le fentanyl dans cette catégorie « d’armes de destruction massive ».

« Seulement 5 % de la cocaïne produite en Colombie transite par cette zone », a appuyé Gustavo Petro, qui a ensuite évoqué l’attaque sur le sol vénézuélien menée dans le plus grand secret par la CIA il y a quelques jours.

« Nous savons que Trump a bombardé une usine à Maracaibo, a affirmé Petro. Nous pensons qu’y était mélangé de la pâte de coca pour fabriquer de la cocaïne, en profitant de la situation géographique de Maracaibo, en bord de mer. » Avant d’accuser les rebelles de l’ELN (Armée de libération nationale), une guérilla marxiste léniniste de Colombie, de faire le jeu des États-Unis en étant ceux qui contribuent à la production de drogue. « C’est tout simplement l’ELN, avec sa violence constante et son dogmatisme, qui permet l’invasion du Venezuela », a ciblé Petro.

« Le prix de la cocaïne a chuté en Europe »

Le président de la Colombie a ensuite livré son analyse de la typologie du marché européen, qui agit comme un appel d’air sur la production sud-américaine. « Aujourd’hui, face à une demande croissante en Europe, due à l’expansion de la culture de la coca en Amérique latine, le prix de la cocaïne a chuté, a détaillé Gustavo Petro. D’immenses entrepôts en Afrique stockent des dizaines de tonnes de cocaïne, et le prix de la coca en Colombie s’est effondré ; le cannabis et l’or illicite sont désormais plus rentables que la cocaïne. »

L’article du New York Times a par ailleurs mis en lumière la crainte des pêcheurs des côtes sud-américaines. Ces frappes presque aveugles, qui ont visé des embarcations de manière trop légère, peuvent demain tout aussi bien frapper des bateaux de marins. « En temps normal, nous irions jusqu’à 15 kilomètres au large pour trouver du thon qui se vend mieux, a ainsi déclaré un pêcheur. Nous avons laissé nos filets là-bas parce que nous avons trop peur d’aller les récupérer. »

Tout en confiant apercevoir ces drones américains qui s’apprêtent à frapper toute embarcation suspecte : « On dirait des petits avions, des oiseaux qui traquent une proie », a-t-il dit. Au Venezuela comme en Colombie, l’incompréhension semble totale vis-à-vis du gouvernement des États-Unis.

Gustavo Petro, lui, a conclu son message par une attaque frontale vis-à-vis de l’administration Trump : « Trump a été amené à croire que je suis un homme de paille de Maduro, d’où ses récentes allusions à mon sujet. Je pensais que les services de renseignement américains étaient plus professionnels, ou peut-être, même s’ils le sont, le président américain ne les écoute pas et s’entoure d’extrémistes de droite avides qui ne cherchent pas la vérité. (…) Quelle honte de la part du gouvernement américain ! »