Nobel de la paix : la lauréate Maria Corina Machado est introuvable, c’est sa fille qui viendra chercher le prix à Oslo
Cette fois c’est certain, elle ne sera pas présente. La cheffe de l’opposition vénézuélienne, Maria Corina Machado, sera absente à la cérémonie de remise de son prix Nobel de la paix, ce mercredi, à Oslo, la capitale de la Norvège. Elle y sera représentée par sa fille, a annoncé le directeur de l’Institut Nobel norvégien.
« Ana Corina Machado recevra le prix au nom de sa mère », a déclaré Kristian Berg Harpviken au micro de la radio norvégienne NRK. « Ce sera la fille qui prononcera le discours que Maria Corina elle-même a écrit. Je ne sais tout simplement pas où elle se trouve exactement. » Très peu de gens savent où et comment elle se déplace en raison de la nature répressive du régime de Nicolas Maduro, « prêt à utiliser absolument tous les moyens contre l’opposition ».
Après l’annulation de la traditionnelle conférence de presse Nobel mardi, des doutes croissants planaient autour de la participation de Maria Corina Machado. « Elle ne vient pas à la cérémonie », a finalement annoncé le porte-parole de l’institut, Erik Aasheim, ce mercredi matin.
L’opposante est entrée dans la clandestinité au Venezuela en août 2024, quelques jours après une élection présidentielle à laquelle elle avait été empêchée de se présenter. Sa dernière apparition publique remonte au 9 janvier, lors d’une manifestation à Caracas, la capitale vénézuélienne, contre l’investiture du président de gauche Nicolas Maduro pour son troisième mandat, remporté dans des conditions contestées.
Le Nobel de la paix a été attribué à l’opposante de 58 ans le 10 octobre pour ses efforts en faveur d’une transition démocratique au Venezuela. Les États-Unis et une partie de la communauté internationale ne reconnaissent pas les résultats de l’élection présidentielle de juillet 2024 à l’issue de laquelle Nicolas Maduro a remporté un troisième mandat de six ans. L’opposition a dénoncé une fraude et revendiqué la victoire de l’opposant Edmundo Gonzalez Urrutia, aujourd’hui en exil.
L’annulation de la participation de Maria Corina Machado survient alors que plusieurs chefs d’État d’Amérique latine ayant en commun des affinités idéologiques avec le président américain Donald Trump, tel le président argentin Javier Milei, sont déjà arrivés à Oslo pour participer à la cérémonie. La mère octogénaire de la lauréate, ses trois sœurs et ses trois enfants ont aussi fait le déplacement.
Éviter de se retrouver longtemps en exil
Le mois dernier, le procureur général du Venezuela a dit à l’AFP (Agence France presse) que Maria Corina Machado serait considérée comme « fugitive » si elle quittait son pays, où elle est accusée selon lui d’« actes de conspiration, d’incitation à la haine et de terrorisme ». Sa venue à Oslo aurait donc soulevé l’épineuse question de son éventuel retour au Venezuela ou de sa capacité à diriger l’opposition vénézuélienne depuis un hypothétique exil.
« Elle risque d’être arrêtée si elle rentre, même si les autorités ont fait preuve de plus de retenue avec elle qu’avec beaucoup d’autres parce qu’une arrestation aurait une portée symbolique très forte », a expliqué mardi Benedicte Bull, professeure spécialiste de l’Amérique latine à l’Université d’Oslo. D’un autre côté, « elle est la dirigeante incontestée de l’opposition, mais si elle reste longtemps en exil, je pense que cela changera et qu’elle perdra progressivement de l’influence politique ».
Des manifestations pro et anti-Machado sont prévues dans la capitale norvégienne, placée sous très haute sécurité. Si elle est saluée par beaucoup pour ses efforts en faveur d’une démocratisation au Venezuela, elle est aussi critiquée par d’autres pour la proximité de ses idées avec le président américain Donald Trump, auquel elle a dédié son Nobel.
La remise du prix coïncide avec la mise en place par les États-Unis d’un important dispositif militaire dans les Caraïbes et des frappes américaines mortelles sur des bateaux présentés comme se livrant au trafic de drogue, des opérations que l’opposante a justifiées. De son côté, Nicolas Maduro assure que leur véritable objectif est de le renverser et de s’emparer des réserves pétrolières du Venezuela.

