« Elle a épousé son frère » : qui est Ilhan Omar, l’élue démocrate d’origine somalienne insultée par Donald Trump ?
On aurait pu croire que les États-Unis se seraient habitués à la façon très personnelle de s’exprimer de Donald Trump, notamment quand il évoque des adversaires politiques. Et pourtant, la violence de ses diatribes arrive toujours à surprendre et à choquer. La nuit dernière, lors d’un discours sur le thème du coût de la vie en Pennsylvanie, il a lâché les chevaux, et même un peu plus sur Ilhan Omar, une Représentante (députée) de l’État du Minnesota.
Trump: "Ilhan Omar, whatever the hell her name is. With her little turban. I love her. She comes in, does nothing but bitch ... we ought to get her the hell out ... she's here illegally."
The crowd in Pennsylvania then starts chanting "send her back!" pic.twitter.com/Otk0o5PAWE— Aaron Rupar (@atrupar) December 10, 2025
Ilhan Omar est devenue une sorte d’obsession pour Donald Trump, qui s’en sert comme cible car elle représente une métaphore de son combat politique : immigrée, d’origine somalienne, de confession musulmane, elle permet à Donald Trump de faire d’une pierre trois coups dans son discours ultra conservateur.
« J’adore cette Ilhan Omar, quel que soit son nom, avec son petit turban, a commencé Trump, faisait référence au hidjab de l’élue. Je l’adore, elle arrive, ne fait que se plaindre… Elle est toujours en train de râler. » Ilhan Omar, aujourd’hui âgée de 43 ans, est arrivée à l’adolescence aux États-Unis. Pour ajouter au trouble de son propos, quand il l’accuse de « se plaindre », Donald Trump utilise un mot (bitch) qui est aussi utilisé comme une insulte très graveleuse aux États-Unis…
Le président des États-Unis n’en est pas resté là : « Elle vient d’un pays qui est considéré comme l’un des pires au monde, non ?, a-t-il poursuivi. Et elle a épousé son frère pour entrer ici, c’est ça ? » La thèse complotiste a été démentie à de nombreuses reprises. Pas suffisant pour Donald Trump : « Vous imaginez si Donald Trump avait épousé sa sœur ?, a poursuivi le président américain, faisant rire l’assistance. C’est une personne formidable. Si j’épousais ma sœur pour obtenir la nationalité, vous croyez que je tiendrais deux heures ? Ou même moins ? »
Née en Somalie, enfance au Kenya
La foule a semblé apprécier le moment. « Elle a épousé son frère pour entrer ici, a insisté Trump. Du coup, elle est en situation irrégulière. Qu’elle dégage ! Qu’on la foute dehors ! Elle ne fait que se plaindre. » « Mettez là dehors », a repris en chœur le public, dans des accents bien lointains au thème du coût de la vie, censé être l’objet du déplacement du président.
L’élue a réagi sur les réseaux sociaux : « L’obsession de Trump à mon encontre est plus que bizarre, a-t-elle écrit. Il a vraiment besoin d’aide. Étant donné qu’il n’a aucun programme économique à mettre en avant, il se contente de proférer des mensonges sectaires. Il continue de faire honte au pays. »
Née en 1982 à Mogadiscio, en Somalie, Ilhan Omar a passé son enfance dans un pays ravagé par la guerre civile. À l’âge de huit ans, elle a fui le pays avec sa famille et vécu plusieurs années dans un camp de réfugiés au Kenya, avant d’obtenir l’asile aux États-Unis au milieu des années 1990. Elle s’est alors installée alors à Minneapolis, dans le Minnesota, un État du Midwest qui accueille une importante communauté somalienne. Elle devient citoyenne américaine à l’adolescence, un élément central de son récit politique.
Trump’s obsession with me is beyond weird. He needs serious help.
Since he has no economic policies to tout, he’s resorting to regurgitating bigoted lies instead.
He continues to be a national embarrassment. https://t.co/sFsGpxOf7o— Ilhan Omar (@IlhanMN) December 10, 2025
Elle a travaillé pour plusieurs campagnes démocrates, milite sur des questions sociales et est élue en 2016 à la Chambre des représentants du Minnesota. Deux ans plus tard, en 2018, elle est élue au Congrès des États-Unis. Cette élection est historique à plusieurs titres : elle devient l’une des deux premières femmes musulmanes élues au Congrès, la première élue d’origine somalienne et l’une des rares parlementaires à porter le hidjab dans l’enceinte du Capitole.
À Washington, Ilhan Omar s’est imposée rapidement comme une figure de l’aile gauche du Parti démocrate. Elle fait partie d’un petit groupe surnommé « The Squad », aux côtés notamment d’Alexandria Ocasio-Cortez. Elle défend des positions clairement progressistes sur la santé, l’éducation, le logement, l’immigration et la justice sociale. Elle critique régulièrement l’influence des grandes entreprises et plaide pour un État plus protecteur, dans une veine proche de celle de Bernie Sanders.
C’est cependant sur la politique étrangère que son nom fait le plus souvent la une. Ilhan Omar adopte des positions très critiques envers la politique israélienne et le soutien traditionnel de Washington à Israël. Autant de raisons qui ont poussé Donald Trump, en guerre de plus en plus totale contre l’immigration, à s’en prendre à elle.

