Attaques des États-Unis en mer des Caraïbes : la publication d’une vidéo qui empoisonne l’administration Trump
Verra-t-on jour les images complètes de la première attaque des États-Unis en mer des Caraïbes, qui avaient tué le 2 septembre dernier 11 personnes, suspectées d’être des trafiquants de drogue ? L’affaire empoisonne depuis plusieurs jours le gouvernement de Donald Trump, car ces images sont censées montrer deux survivants, accrochés à un bateau, être abattus de sang-froid par l’armée américaine alors qu’ils ne représentent manifestement aucune menace.
Jusqu’à présent, le ministère de la guerre n’a rendu public que la première partie de la vidéo satellite, où on aperçoit une image un peu sombre, suivie d’une violente explosion, celle qui a touché l’embarcation. L’administration Trump est sous le feu des critiques, depuis le début de ces attaques qui ont provoqué la mort de plus de 80 personnes en trois mois, pour agir en dehors de tout cadre légal.
Donald Trump et son ministre de la Défense prétendent être en situation de guerre, contre les trafiquants de drogue, mais il apparaît de plus en plus clair qu’il s’agit tout simplement d’une volonté délibérée de sortir de l’État de droit, en tuant sans enquête ni preuve des suspects de crimes même pas passibles de la peine de mort aux États-Unis.
La mort de ces deux survivants est en effet considérée comme une preuve du souhait de s’affranchir du cadre légal, en ne respectant même pas le droit de la guerre dans lequel ils prétendent agir. « J’ai vu cette vidéo, a tenté de déminer Donald Trump lundi. Ils (NDLR : les deux survivants) essayaient de sauver le bateau, et vous n’avez pas envie de cela parce que le bateau était rempli à ras bord de drogues. »
Certains élus, qui ont pu voir cette vidéo, n’ont pas tout à fait eu la même lecture que le chef d’Etat américain, et en sont ressortis choqués. Hier, c’est Chuck Schumer, le chef des démocrates au Sénat, qui a haussé le ton, après une rencontre avec Pete Hegseth, le ministre de la Guerre.
« C’était une réunion très décevante, a déclaré le sénateur. J’ai demandé au ministre de la Défense Hegseth s’il était prêt à laisser les membres du Congrès voir la vidéo non retouchée des frappes du 2 septembre. Il a répondu qu’ils devaient étudier la question. De mon point de vue, ils l’ont étudiée assez longtemps, et le Congrès doit être capable de voir ces images. Je lui ai dit que chaque membre du Congrès, démocrate et républicain, a le droit de les voir, veut les voir et devrait les voir. »
« Insupportable » : la colère de Trump contre une journaliste
La Maison Blanche et le Pentagone ont conscience de jouer gros sur cette affaire. Si l’armée américaine a tué sciemment deux personnes non armées et sans défense, elle ne pourra pas se défendre en invoquant un quelconque danger. Comme une patate chaude, tout le monde essaie de se dédouaner. Lundi, Donald Trump s’en est violemment pris à une journaliste d’ABC qui l’interrogeait sur le sujet.
« Voulez-vous que cette vidéo soit rendue publique ? », tente pour une troisième fois Rachel Scott, la journaliste, après deux réponses du président à côté. « Vous êtes la journaliste la plus insupportable de toute la place, et une très mauvaise journaliste », finit par la couper Donald Trump, dont les insultes et les attaques personnelles trahissent toujours son inconfort sur le sujet. « Quoi que Pete Hegseht ait envie de faire, je suis d’accord », conclut le président américain.
.@rachelvscott: "Are you committed to releasing the full video?
Pres. Trump: "Didn't I just tell you that. You are the most obnoxious reporter in the whole place. You are an obnoxious, actually a terrible reporter...I told you whatever Pete Hegseth wants to do is okay with me." pic.twitter.com/CHPGxgHKIG— CSPAN (@cspan) December 8, 2025
Le problème, c’est que Pete Hegseth essaie lui aussi de se défausser sur l’échelon inférieur. C’est l’amiral Frank Bradley, en charge de ces opérations, qui a été envoyé au feu par le Pentagone. Son nom a été cité par le ministère de la guerre, puis par la porte-parole de la Maison Blanche Karoline Leavitt, comme une volonté de se garder la possibilité d’un fusible si les choses venaient à mal tourner.
« L’amiral Mitch Bradley est un héros américain, un véritable professionnel, et il a mon soutien inconditionnel », a ainsi posté Hegseth sur X, alors que personne, jusque-là, ne considérait encore Bradley comme le potentiel responsable de ces dérapages.
Lors d’auditions devant des parlementaires qui cherchent à faire la lumière sur l’incident, la semaine dernière, l’Amiral Bradley, lui, ne s’est défaussé sur personne et a endossé la responsabilité des attaques, ont révélé les médias américains.

